Protéger les sources des journalistes

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Date: 16 juin 2017
Auteur: Daniel Nadeau

Ces jours-ci, la Commission Chamberland, une commission d’enquête sur la protection de la confidentialité des sources journalistiques, prend son envol. On se rappelle que cette commission a été mise sur pied par le gouvernement du Québec dans la foulée de la chasse aux sources journalistiques au SPVM. Au passage, nous avons pu découvrir que cette pratique était plus répandue que nous pouvions l’imaginer et que des usages similaires existaient aussi à la Sureté du Québec.

Disons-le franchement, la protection de la confidentialité des sources journalistiques intéresse beaucoup moins le grand public que la corruption, la collusion concernant le financement des partis politiques mis en valeur par la Commission Charbonneau ou du scandale des commandites de la Commission Gomery. N’empêche que même si le sujet nous passionne moins, il n’en est pas moins fondamental pour notre vie démocratique.

Les journalistes peuvent révéler ce qui doit être dénoncé que par l’usage de sources privilégiées ou de sonneurs d’alerte. Ils peuvent aussi contribuer à nos débats démocratiques grâce à la Loi d’accès à l’information. En fait, les fuites, les sources confidentielles et la Loi d’accès à l’information sont les seuls outils d’information qu’ont les médias pour renseigner le grand public dans le cadre d’enquêtes journalistiques afin de « dénoncer les coquins » comme le disait le fondateur du journal Le Devoir, Henri Bourassa. Il tombe sous le sens que les sources des journalistes doivent être protégées si l’on souhaite vivre en démocratie et que nos médias ne soient pas des perroquets utiles des communiqués de presse bien léchés que produisent des gens comme moi qui pratiquent le métier des relations publiques.

Il faut donc que notre société de droits préserve les sources des journalistes et garantisse leur confidentialité sinon nous aurons beaucoup moins de faits à nous mettre sous la dent pour alimenter nos débats démocratiques. En ce sens, on doit saluer l’existence d’une commission d’enquête sur ce sujet.

En même temps, on est tenu de se préoccuper de la responsabilité des médias qui pour des raisons pas toujours édifiantes peuvent donner dans le sensationnalisme et le spectaculaire. C’est souvent le fait d’enquêtes journalistiques comme celle que l’on retrouve dans le Journal de Montréal, relayé devant un auditoire imposant sur l’ensemble du réseau TVA. Le populisme ne fait pas nécessairement bon ménage avec l’équilibre qu’exige la santé démocratique de nos débats.

Ce que nous devons garder en mémoire c’est que la commission Chamberland aura retenu notre attention grâce aux témoignages de deux personnages populaires parmi la gent journalistique, Marie-Maude Denis de Radio-Canada et Patrick Lagacé de La Presse+ et de Télé-Québec. La première s’est rendue célèbre par les révélations qui ont mené à la Commission Charbonneau et le second en étant la cible principale du SPVM et en ayant fait l’objet d’intrusions inacceptables dans sa vie privée. On a même appris que l’un des mandats obtenus pour mettre sous écoute madame Denis était de fausses allégations de relations intimes qu’elle aurait eues avec un membre du SPVM. Faut le faire! Pire encore, les policiers avaient pour hypothèse de travail principale que les médias concurrents s’échangeaient des scoops. Hypothèse grossière et farfelue.

Il est intéressant de constater que nous nous penchons sur l’importance de protéger les sources journalistiques au Québec et encore plus que l’on fasse la lumière sur les procédés douteux des pratiques policières au SPVM. C’est un bon début pour faire le ménage dans cette institution vitale pour notre équilibre démocratique. Nous devons avoir confiance dans les services policiers et dans notre système de justice sinon il ne peut y avoir de société de droits ni de démocratie…

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